PFAS : le vent tourne et c’est une bonne chose !

Chère amie, cher ami, 

Le 19 mars dernier, la métropole de Lyon a déposé une plainte contre deux industriels Arkema et Daikin. 

Ces entreprises sont accusées d’être à l’origine de la présence de PFAS dans les captages d’eau de la région. (2)

Quelques jours plus tard, le 4 avril 2024, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi qui vise à interdire les PFAS dans certains produits, notamment les cosmétiques d’ici 2026 et les vêtements d’ici 2030. 

Mais que sont les PFAS ? 

Il s’agit de produits chimiques qui associent du carbone et du fluor. 

C’est le cas par exemple du Teflon aussi appelé le Poly Tetra Fluor Éthylène qui a été découvert en 1938 par un chimiste de l’entreprise américaine Dupont de Nemours (dont le fondateur au 18e siècle était français). (2)

Ces produits sont aussi appelés les per- et polyfluoroalkylés ou PFAS. 

Les chimistes se sont rendu compte que la liaison entre le fluor et le carbone, associée à d’autres molécules, donnait des matériaux ultra résistants à l’eau, au feu ou encore à la graisse. (3,4,5)

Ils ont donc des propriétés de résistance exceptionnelles ce qui en fait des matériaux inusables et pratiques, mais ce sont aussi des “polluants éternels”. (3)

Une fois qu’ils sont dans la nature, ils sont difficiles à éliminer. Et cela est vrai aussi dans le corps humain !  

Ils ont d’abord été utilisés à des fins militaires dans les années 40. 

Ils servaient notamment à couvrir les chars pour les protéger du feu ennemi. 

Ils auraient également été utilisés dans le cadre du projet Manhattan destiné à fabriquer la bombe atomique. 

Où trouve-t-on des PFAS ? 

Mais après la guerre, les fabricants de PFAS ont proposé leurs matériaux à la société civile avec beaucoup de succès. 

Et aujourd’hui, on trouve des PFAS dans de très nombreux produits tels que les (4,5) : 

  • poêles antiadhésives,
  • implants médicaux,
  • emballages alimentaires,
  • mousses d’incendie,
  • vêtements de pompiers, voire vêtements du quotidien,
  • revêtements anti-tâches,
  • cosmétiques, en particulier waterproof,
  • produits informatiques,
  • fusées,
  • etc. 

L’offensive de Rob Bilott  

L’un des premiers lanceurs d’alerte sur le sujet est un avocat américain de Cincinnati. 

Il s’appelle Robert Bilott. 

L’ironie du sort a voulu qu’il soit plutôt du côté des industriels de la chimie au départ. (5)

Il commence sa carrière en 1990. 

Pendant 8 ans, il aide ses clients à éviter les normes environnementales imposées aux entreprises. 

Mais en 1998, un agriculteur l’appelle. C’est un ami de sa grand-mère qui habite en Virginie occidentale. Ses vaches meurent les unes après les autres. 

Cela va si vite qu’il n’a même pas le temps de les enterrer. Il doit brûler les cadavres. 

Il est désespéré. 

Rob Bilott accepte de se plonger dans ce dossier qui devient toute sa vie. (5)

En 2001, il dépose un recours collectif au nom de 3000 fermiers contre Dupont de Nemours. 

En 2017, la justice lui donne raison. 

L’entreprise est condamnée à payer 617 millions de dollars en réparation du préjudice causé aux fermiers par les PFAS émis par les usines de Dupont. 

En 2016, il a rejoint le conseil d’administration de la Next Generation Choices Foundation, un organisme non lucratif qui lutte pour la prévention du cancer.  

Et en 2018, Robert Bilott dépose un nouveau recours collectif contre Dupont, Chemours, et 3M pour les pollutions que ces groupes industriels ont causées. 

Ce procès retentissant a inspiré le film Dark Waters qui a permis au public américain et anglophone de prendre la mesure du phénomène. (5,6)

Quels sont les risques des PFAS pour la santé ?

Il était temps. 

Car les PFAS sont des substances particulièrement nuisibles pour la santé humaine et l’environnement. 

Depuis les années 90, de nombreuses études sont parues sur le sujet. 

Il ressort de la littérature scientifique que les PFAS (7,8,9) :

  • fragilisent l’immunité,
  • augmentent le risque de cancer,
  • font chuter la fertilité,
  • provoquent des lésions au foie,
  • augmentent le risque de diabète de type II et d’obésité,
  • menacent le développement des foetus,
  • Etc. 

Depuis le 1er décembre 2023, le Centre International de Recherche contre le cancer a classé une partie de ces substances comme cancérogènes certains (lPFOA), d’autres cancérogènes probables (PFOS). (9) 

L’ennui, c’est que les PFAS représentent 10 000 à 14 000 molécules selon les estimations. (3,4)

Et à chaque fois que l’une d’entre elles est interdite, les industrielles en trouvent une de remplacement que personne n’a encore évaluée. 

Quelle réponse législative doit-on apporter ? 

L’urgence sanitaire et écologique est bien réelle. 

Il y aurait, rien qu’en France, plus de 100 000 sites contaminés aux PFAS. 

Cette contamination vient d’abord des usines qui les produisent. 

La France compte cinq sites à risque : 

  • 1 installation Chemours dans l’Oise, 
  • 2 installations pour Solvay dans le Jura et le Gard, 
  • 2 installations près de Lyon à Pierre-Bénite, l’une pour Daikin et l’autre pour Arkéma.

L’ennui, c’est que cette activité économique représente plusieurs milliers d’emplois. 

Interdire totalement ces substances serait dangereux pour de nombreuses familles qui dépendent de ces activités. 

Mais en attendant, les populations exposées aux émanations des sites de production sont directement menacées. 

Et à cause de leur résistance, ces molécules chimiques se trouvent peu à peu partout : dans les nappes phréatiques, dans les rivières, les sources et dans l’air.

Pour l’instant, le législateur essaie de distinguer les usages essentiels ou non essentiels de ces produits. 

Ainsi, les PFAS pourraient être interdits dans les cosmétiques et les vêtements non professionnels, mais maintenus pour les tenues de pompier ou le matériel militaire. 

À l’évidence, il faut sortir de ces productions nocives. 

L’Union Européenne pourrait à terme interdire l’usage de l’ensemble de ces molécules. (6)

Mais il serait bon que de telles mesures soient accompagnées d’un plan de réindustrialisation saine, un made in France écologique, en quelque sorte. 

Mais est-ce réaliste ? 

Naturellement vôtre, 

Augustin de Livois

 


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