Un sol mort peut-il donner de bons aliments ?

Chère amie, cher ami,

Les recommandations officielles nous disent qu’il faut consommer tous les jours 5 fruits et légumes.[1]

Bénédicte Van Craynest, nutritionniste, ajoute souvent, à ce moment-là, qu’entre les fruits et les légumes, il faut privilégier les légumes.[2]

Mais qu’il s’agisse des uns ou des autres, ils ne sont vraiment bons pour la santé que s’ils ont des nutriments.

Et pour cela, il faut qu’ils aient poussé dans un sol vivant et non un sol mort.

Et cela est également vrai des céréales et des légumineuses.

Des fruits et légumes qui viennent d’un sol mort ne vous apportent que très peu de vitamines et de minéraux.[3]

Vous aurez alors besoin d’en consommer bien plus de 5 portions par jour pour espérer fournir à votre corps la quantité de vitamines et de minéraux dont il a besoin.

Qu’est-ce qu’un sol mort ?

C’est une terre qui s’est vidée de ses nutriments. C’est également une terre dépeuplée. Car les microorganismes qui y habitaient, comme les bactéries, les protozoaires, les champignons, les nématodes et autres vers de terre, ont disparu.[4]

Or ces microorganismes représentent 75 à 95% de la biomasse vivante.[3,4]

S’ils disparaissent, la terre devient inerte, sans vie. Elle n’est plus fertile.

Elle risque de se transformer en désert.[5]

Et ce phénomène menace les grandes plaines européennes comme, par exemple, celles de la Beauce ou les terres fertiles des Flandres.

Sur ces terres, souvent dédiées aux monocultures de céréales, les rendements stagnent depuis les années 90.[6]

À long terme, voire à moyen terme, il est probable qu’ils baissent. Car les sols sont en train de mourir. Cela est dû en grande partie au mode d’agriculture actuel, qui n’est pas durable, et que nous peinons à changer.

Il y a quatre grandes raisons à cela.

1/ Les sillons trop profonds accentuent la pression du vent

Le vent souffle sur les champs et attaque la terre. Si le sol est nu, il s’assèche. À l’inverse, un sol où poussent des plantes résiste mieux.

Une terre labourée profondément puis exposée aux quatre vents s’épuise rapidement.[7]

Pour la protéger, mieux vaut creuser des labours peu profonds et protéger les parcelles avec des haies.[7]

De même, le fait d’avoir plusieurs cultures sur une même parcelle, une d’hiver et une d’été par exemple, permet d’éviter l’érosion.

C’est l’une des stratégies adoptées par les permaculteurs ou les tenants de l’agriculture naturelle de Masanobu Fukuoka.[8]

Les énormes tracteurs qui retournent la terre de plus de 30 centimètres la massacrent, comme le montre parfaitement l’excellent reportage de France 2 “Les soigneurs de la terre”.[7]

Cette vidéo d’un peu plus d’une demi heure montre parfaitement comment on est arrivé à une situation catastrophique pour les sols en France.

Les chercheurs de l’INRAE sont inquiets pour l’avenir. Pour eux, à poursuivre le système agricole actuel avec ses monocultures et ses sillons profonds, nous allons droit dans le mur.[8]

2/ Les pesticides tuent les sols

De même, l’usage des herbicides, fongicides et insecticides, appelés de manière générique pesticides, jouent sur la vitalité des sols.[9]

Comment pourrait-on s’en étonner ?

Ces substances, souvent chimiques, ont pour objectif de tuer la vie.

Ils tuent aussi les vignerons et les agriculteurs à petit feu.[10]

Et ces derniers, pour s’adapter, mettent des gants…[11]

Cela n’enlève pas la toxicité des produits qui, à un moment ou à un autre, se retrouvent dans les rivières et dans vos assiettes…

Dans le monde, 4 millions de tonnes de pesticides sont déversées chaque année.[12]

Et la tendance est à la hausse. En 20 ans, l’usage des pesticides a augmenté de 40% dans le monde, même s’il a légèrement baissé en France.[13,14]

Notre pays reste néanmoins l’un de ceux qui utilisent le plus de pesticides dans le monde et en Europe.[15]

Les fongicides et les insecticides sont une menace directe pour les micro-organismes du sol.[16]

Or ces microorganismes sont essentiels pour apporter aux sols et aux végétaux leurs nutriments.

Leur présence stabilise le pH du sol, ce qui est préférable pour les plantes qui y poussent.[17]

En détruisant les êtres vivants présents dans le sol, les pesticides privent la terre des nombreux services écosystémiques de cette faune souvent invisible à l’œil nu.[18]

Par exemple, les pesticides détruisent de nombreux champignons mycorhiziens. Ces derniers, pourtant, sont essentiels pour les apports en phosphore dont les plantes ont besoin.[19]

Ces champignons situés au niveau des racines, assurent un lien permanent entre la vie du sol et les plantes. Ils sont comme un grand axe de communication et de transport pour les minéraux et de nombreuses substances chimiques naturelles.[19]

Certaines associations, comme Générations Futures, et leurs experts, estiment qu’il existe une corrélation directe entre pesticides et présence de champignons mycorhiziens dans les champs.[20]

Plus la présence de pesticides est élevée, moins il y a de champignons mycorhiziens. Et moins le sol est fertile et moins les plantes qui poussent dans ce sol contiennent de minéraux et de vitamines.[20]

Un sol inerte donne des cultures pauvres d’un point de vue nutritif.

Par ailleurs, les résidus de pesticides sont persistants. Ils restent des années, parfois des centaines d’années dans les sols, qui se trouvent ainsi contaminés.[21]

C’est ce que la Martinique et la Guadeloupe ont connu avec la chlordécone, un puissant pesticide qui pourrait contaminer les sols jusqu’en 2600 ! Et ce sont les projections officielles ! 700 ans de contamination ![22]

3/ La monoculture limite la biodiversité organique des sols

Des champs mornes à perte de vue constitués d’une seule variété. Voilà ce qu’est la monoculture. L’ensemencement massif permet d’avoir de vastes étendues de blé, de soja, de coton ou de canne à sucre.[23]

Ce type d’agriculture domine le monde parce qu’il est très efficace. Il s’est imposé depuis les années 60. Mais il présente de nombreux inconvénients. D’abord, c’est un modèle fragile : il suffit d’une seule maladie touchant la variété plantée pour que l’ensemble de la plantation soit menacée.

Et c’est pour cela que ces champs sont saturés de pesticides. Ils ont besoin d’être massivement protégés. Les aliments issus de la monoculture peuvent donc être toxiques. Ce n’est pas une surprise si l’on a retrouvé d’importantes traces de cadmium dans le blé de France ![24]

La polyculture ou même les doubles cultures sont moins exigeantes pour le sol et nécessitent moins de pesticides. Mais c’est un travail plus précis et parfois plus aléatoire.

4/ Les engrais appauvrissent les sols

Les engrais sont issus de l’industrie pétrochimique. Ils contiennent des substances totalement artificielles.[25]

Ils contiennent notamment une concentration très forte d’azote, de phosphore et de potassium ainsi que d’autres produits chimiques comme de l’acide chlorhydrique ou de l’acide sulfurique.

Toutes ces substances altèrent l’équilibre des sols. Il sont appauvris et moins favorables à la croissance des plantes.[25]

Ils auront besoin de toujours plus d’engrais pour continuer à produire.

En outre, les engrais font pousser les plantes trop vite.

Les minéraux ont moins le temps de s’y installer.

Si en plus, les fruits et légumes sont cueillis très tôt et mûris durant leur transport, ils n’ont plus beaucoup de minéraux et de vitamines à offrir lorsqu’ils arrivent sur vos étals.

Enfin, les engrais, comme les pesticides, finissent dans les rivières et saturent votre eau potable. Comme si elle ne contenait pas déjà suffisamment d’hydrocarbures ![27]

La seule solution durable aux engrais est l’utilisation de résidus naturels. Cela peut être le fumier, le compost, le paillage, les feuilles, etc.

Toutes ces matières organiques placées au-dessus du sol vont s’y enfoncer lentement et s’y fondre grâce à l’action de multiples micro-organismes.[27]

Que faire à titre individuel ?

La solution est d’opter pour une alimentation à base de légumes plus que de céréales.

Malheureusement, différentes études ont montré qu’il y avait eu une chute drastique des nutriments dans de nombreux fruits et légumes.[28]

La solution consiste donc à se fournir d’abord dans votre jardin ou celui de vos voisins s’ils sont suffisamment généreux pour partager leurs récoltes.

En alternative, il y a votre excellent maraîcher ou un producteur local qui n’utilise pas ou peu de pesticides.

Naturellement vôtre,

Augustin de Livois

 


[1] justicepourledocteurlabreze.info
[2] Faites la paix avec votre ventre, EAL, 2021
[3] https://www.theepochtimes.com/health/soil-depletion-and-what-it-means-to-you_4915467.html
[4] https://www.lafranceagricole.fr/article/article/745833/les-micro-organismes-constructeurs-des-sols
[5] https://www.passerelleco.info/article.php?id_article=1038
[6] https://normandie.chambres-agriculture.fr/fileadmin/user_upload/National/FAL_commun/publications/National/Revue_Chambres-agriculture_1031_2014_Rendements_Grandes_Cultures.pdf
[7] https://www.youtube.com/watch?v=sIQVjgso98M
[8] https://www.passerelleco.info/article.php?id_article=1806
[9] https://www.rtl.fr/actu/international/les-pesticides-nuisent-a-des-organismes-vitaux-dans-les-sols-selon-une-nouvelle-etude-7900027797
[10] https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/pesticides/article/effets-sur-la-sante-d-une-exposition-a-des-pesticides
[11] https://aldenagloves.fr/gants-pour-agriculture/
[12] https://www.futura-sciences.com/planete/questions-reponses/agriculture-pesticides-pays-plus-gros-consommateurs-10757/
[13] https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/02/20/les-chiffres-noirs-des-ventes-de-pesticides-extremement-dangereux_6030165_3244.html
[14] https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/la-france-a-encore-du-mal-a-reduire-sa-consommation-de-pesticides-1336095
[15] https://www.generations-futures.fr/publications/pesticides-qui-sont-les-plus-gros-consommateurs-en-europe/
[16] https://www.officiel-prevention.com/dossier/protections-collectives-organisation-ergonomie/risque-chimique-2/la-prevention-des-risques-professionnels-des-fongicides
[17] https://lavierebelle.org/ph-du-sol
[18] https://www.inrae.fr/actualites/sols-proprietes-aux-services-ecosystemiques
[19] https://blog.defi-ecologique.com/mycorhizes-utiles-nos-cultures/
[20] https://www.generations-futures.fr/actualites/pesticides-sol/
[21] https://www.generations-futures.fr/actualites/residus-pesticides-alimentation/
[22] https://www.martinique.gouv.fr/content/download/11514/87367/file/Dur%C3%A9e%20de%20contamination%20des%20sols.pdf
[23] https://www.agroptima.com/fr/blog/monocultures-pratique-planete/
[24] https://www.perspectives-agricoles.com/file/galleryelement/pj/89/bb/9a/fb/391_2645216147240544375.pdf
[25] https://www.lapresse.ca/affaires/2019-08-17/les-engrais-chimiques-et-la-disparition-de-nos-sols
[26] http://www.eauxglacees.com/spip.php?page=imprimer&id_article=2541
[27] https://www.jardiner-autrement.fr/le-compostage-mode-demploi/
[28] https://www.nationalgeographic.co.uk/environment-and-conservation/2022/05/fruits-and-vegetables-are-less-nutritious-than-they-used-to-be

3 réponses à “Un sol mort peut-il donner de bons aliments ?”

  1. Nath COSTA dit :

    Pour qu’un sol soit considéré comme « en bonne santé », il faut qu’il contienne un minimum de 3 à 6% de matières organiques. Cette année un yogi indien a lancé un mouvement mondial en faveur des sols, SAVESOIL; ce mouvement a permis de sensibiliser près de 4 milliards d’humains au problème de cette extinction imminente des sols, mais tout reste à faire !!!
    Renseignez-vous pour pouvoir agir et infléchir les politiques gouvernementales pour un engagement en faveur des sols.
    https://savesoil.org/fr

  2. Benoit Challier (benoit.challier8@orange.fr) dit :

    Bonsoir, je viens de lire avec beaucoup d’attention votre lettre d’informations relatives aux microorganismes qui peuplent nos jardins. Quand j’ai commencé à jardiner, j’ai pratiqué pendant un temps donné l’enfouissement des biodéchets. Un jour, j’ai eu l’agréable surprise de voir pousser des melons alors que je n’avais rien planté. J’ai du mettre des graines de melons dans le jardin. Je me suis régalé avec ces melons. De voir ces cultures m’a encouragé à produire quelques légumes et fruits. Lorsque je sème ou que je repique, j’utilise les résidus de tontes afin de faire un paillage. J’ai très vite compris l’utilité du paillage. Mon terrain reste humide en toute saison. Les microorganismes transforment ces déchets végétaux. Mon action ne s’est pas arrêtée en si bon chemin. J’ai planté plusieurs arbustes fruitiers ou non. Leurs feuilles viennent enrichir la terre.Au début de l’automne ou au début de l’hiver, je verse des cendres de bois sur mon jardin. Je recouvre mon jardin avec de la paille ou du broyage de branches. Je peux observer de nombreux insectes qui pollinisent les diverses plantations. J’utilise aussi du purin d’orties fait maison. Portes vous bien. Prenez soin de vous. Chaleureusement, Benoit Challier

  3. TERRIER dit :

    Il y a quelques années j’ai lu un article similaire qui disait qu’aujourd’hui il faut manger 5 pommes pour avoir l’équivalent vitamines et minéraux d’une seule d’en les années 50 (1950) . Trop poussé !

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